Maintien du domaine skiable d’Isenau

C.J.

/ #17 les proprietaires d'Isenau

2011-07-29 20:37

Vaud mercredi24 novembre 2010
Le magnat qui se dépense pour Les Diablerets
Par Marco Danesi
Le Norvégien Kristian Siem a atterri à Ormont-Dessus au tournant du millénaire. Rencontre avec un milliardaire discret, dont les investissements font flamber la station vaudoise
Qui sont ces milliardaires qui font flamber les Alpes suisses? Kristian Siem est l’un d’eux – et l’un des rares à ne pas fuir le contact avec les médias. Au début du millénaire, ce riche armateur norvégien s’est établi aux Diablerets, dans les Alpes vaudoises. Avec d’autres habitués de la station – les frères Schwitzguebel, René de Picciotto et sa fille Alessandra –, il a fondé Diablerets Vrai Village de Montagne (DVVM). La société investit aujourd’hui dans le développement touristique de la station et participe au boom qui emporte la commune, classée parmi les zones exposées au risque de bulle immobilière dans la dernière étude Wuest & Partners.

Kristian Siem a fait fortune en bâtissant des plates-formes pétrolières. Il s’est enrichi en transportant carburants, voitures et touristes à travers les mers et les océans. Son groupe, Siem Industries, créé en 1980, possède 115 navires en tout genre et emploie 6700 collaborateurs. Fin 2009, la compagnie a dégagé 131 millions de dollars (130 millions de francs) de bénéfice net. L’homme d’affaires a autrefois racheté l’ancien paquebot France, rebaptisé Norway.

Kristian Siem a débarqué dans les Alpes vaudoises après que l’un de ses frères, médecin qui travaille à Genève, lui a vanté les délices des Diablerets. De plus, les sommets et les vallons de la région lui sont familiers: à 15 ans, le jeune Kristian a fréquenté un collège du cru.

Kristian Siem a construit un chalet en 2001, puis un deuxième quatre ans plus tard. C’est Jean Nicollier, le frère de l’astronaute Claude, qui a dessiné la première demeure. Celle-ci respecte les lignes et l’architecture locales. Et donne du travail aux entreprises du terroir. L’armateur revendique sa volonté d’intégration: lui autant que sa maison doivent épouser l’esprit des lieux.

Au fil des séjours, Kristian Siem s’attache aux Diablerets. Quand il ne voyage pas pour ses affaires, il passe le plus clair de son temps, jure-t-il, à l’ombre du glacier du Tsanfleuron. Il s’y établit et paie ses impôts au village (taux de 70, dans la moyenne cantonale). Combien et comment? Il n’en dira pas davantage.

Philippe Nicollier, syndic jusqu’en 2009, et Pierre Schwitzguebel, l’ancien président de Lausanne tourisme, l’approchent. Ce dernier lui dévoile ses projets. Rapidement, les conversations amicales débouchent sur du concret.

En 2006, DVVM voit le jour. Kristian Siem détient 56% du capital. Le banquier genevois René de Picciotto avec sa fille, Alessandra, contrôlent une part de 30%. Les frères Schwitzguebel possèdent les 14% restants. La nouvelle compagnie, en accord avec les autorités des Diablerets, acquiert les remontées mécaniques de la station, arme de canons à neige les pistes de ski et rachète trois hôtels. L’un des trois est démoli. Un immeuble de 30 appartements en PPE (propriété par étages) a surgi à sa place.

Les Diablerets, affirme Kristian Siem, sont idéalement placés. La station est proche de Lausanne et Genève, pas loin de l’aéroport de Cointrin. Elle ne ressemble ni à ­Gstaad, ni à Villars, trop huppées. Le village dégage tout le charme montagnard recherché. Pour ce Londonien d’adoption – le siège de Siem Industries se trouve dans la capitale anglaise –, comme pour d’autres sujets britanniques, la Suisse et ses paysages se sont transformés en Eldorado rêvé. Les nouvelles liaisons aériennes raccourcissent les distances. Londres se rapproche des Diablerets. On y vient le week-end.

D’un côté, l’argent ne manque pas. De l’autre, les terrains s’offrent en abondance. Les Diablerets construisent à tour de bras pour accueillir des résidents étrangers d’un nouveau type. L’euphorie est si grande que la crise financière récente n’a pas freiné l’essor immobilier, au risque de la surchauffe: le taux de logements vacants était en 2009 de 3% pour la commune, pour une moyenne cantonale de 0,5%. Le syndic des Diablerets confirme: on bâtit toujours. Philippe Grobéty voudrait bien que cela se calme. Car, paradoxalement, la station souffre d’une certaine inertie. Des commerces ferment et des habitants déménagent. Il devient donc indispensable de reprendre en main l’expansion de la commune. Notamment via une réalisation d’envergure, à l’image d’un établissement de bains thermaux.

L’emprise de DVVM sur les Diablerets n’est pas du goût de tout le monde. Un municipal, en désaccord avec la politique de l’exécutif, quitte son poste. Cependant, répète Kristian Siem, rien ne se fera dans le village sans l’accord de la population. Du coup, à la fin de 2009, l’idée de construire une télécabine en direction du plateau d’Isenau, puis du col du Pillon, enjambant le centre des Diablerets sur des pylônes de plus de 30 mètres, est abandonnée. Il était destiné à remplacer l’installation actuelle dont la concession arrive à échéance en 2012. Le parti des sceptiques et des opposants a eu raison de ce projet à 35 millions. Les propriétaires des terrains concernés exigeaient des dédommagements trop élevés, indique Kristian Siem. Finalement, Glacier 3000 et Villars, qui avaient affiché leur intérêt pour l’entreprise, se sont retirés.

Malgré cet échec, Kristian Siem ne va pas battre en retraite. Un équipement plus modeste est à l’étude. Il coûtera 12 millions. DVVM en engagera 4. Des discussions sont en cours entre la commune et le canton pour obtenir le reste du montant nécessaire, signale Philippe Grobéty