Manifeste affirmant le caractère un et divers de la langue d'Oc

Ive Gourgaud

/ #132 Re: mais votre "immense respect" pour la graphie mistralienne

2012-09-08 18:10

#128: Jean-Frédéric Brun - mais votre "immense respect" pour la graphie mistralienne

Je me retrouve pour l'essentiel dans ce que vous dites, et j'aime que vous aimiez d'Arbaud mais aussi les écrivains originaires de Camargue (et votre remarque sur le remplacement de la langue locale par le provençal mistralien me touche car je considère les parlers de Lunel/Lunel Viel/Lansargues/St-Just comme de type cévenol, donc j'ai envie de les défendre et de les faire (re)connaître). Tout ça pour vous dire que l'équivalent de "l'occitan de référence" (celui qu'écrit Mme Verny), à savoir le provençal de Mistral, non merci dès qu'il prétend sortir de ses limites naturelles... En même temps, comment empêcher des Lunellois de vouloir étudier la langue de Mistral, et ensuite de la pratiquer?

Le problème est assez complexe, et je comprends qu'au PEN Club vous ayez nettoyé le terrain en admettant les deux graphies littéraires.

Bon, si moi je me prenais pour un écrivain et que je vous demande de m'inscrire au PEN comme "écrivain de langue cévenole", quelle serait votre réaction? Si pour vous cévenol=langue d'oc= occitan, ça ne devrait poser aucun problème. D'ailleurs, admettons un instant (on peut rêver!) que je sois un grand écrivain, considèreriez-vous que parce que j'ai une idéologie pluraliste (LES langues d'oc) je suis un ennemi de la littérature occitane ?

Tout le travail (surtout édition/réédition de textes littéraires) que je fais au nom de "la littérature et de la langue cévenoles", ça ne vous servirait à rien, à vous? Ce serait frappé du sceau infamant du "politiquement incorrect"? Sur ce que vous dites ici, je pense bien que non, au contraire. Alors, pour en revenir au début, cette "unité" que vous Manifestez, n'est-elle pas évidente dans la littérature? Mistral (et dans sa graphie d'origine, svp!) n'est-il pas un formidable emblème pour la culture d'oc? Et Boudou (toujours dans sa graphie d'origine, et surtout pas en mistralien!) n'en est-il pas un autre ? (oui, je sais Marie-Jeanne, il était un peu stalinien lui aussi, mais "tendance historique" alors je lui pardonne tout!).

Si l'unité de langue existe, il est inutile voire nuisible de vouloir, même en pédagogie, changer une graphie parfaitement établie: la graphie fait partie du patrimoine. La pédagogie consiste alors à faire lire dans une graphie de base (mettons l'occitane en Languedoc, même si j'ai travaillé sur la mistralienne AUSSI et que ça marchait aussi bien) mais à introduire TRES TOT des textes (faciles au débit) dans l'autre graphie pour habituer l'apprenant et DESACRALISER la graphie: comme le dit Philippe, ben oui on a deux graphies, et alors? Si les Serbes et Croates se sont tapé dessus, ce n'est pas parce qu'ils écrivaient les uns en cyrillique et les autres en lettres latines: or ils savaient tous lire les deux systèmes, pourtant autrement différents que nos deux à nous !

Je me permets donc de continuer à condamner fermement une entreprise comme celle de OC-BEN!: à tout le moins, il fallait éditer les textes DANS LES 2 GRAPHIES, en indiquant quelle était celle de l'auteur, afin de la dignifier.

Car ce que vous dites, avec des paroles d'écrivain, de la beauté de la graphie et du sentiment qui s'y attache, croyez-vous que seuls les Provençaux et les Camargais l'éprouvent? Moi si je lisais Léontine GOIRAND et tous les félibres poètes dans une graphie non mistralienne, j'y perdrais beaucoup, et même l'essentiel. Quant à Boudou, je ne eeux même pas imaginer le lire (le relire, plutôt) autrement que dans sa graphie occitane, qui elle aussi est très belle entre ses mains.

On s'en sortira par la littérature, et chacun avec ses armes: se dire "occitan" ne changera pas un écrivaillon en génie littéraire, idem pour "provençal mistralien", idem pour "langue cévenole". Que chacun chez soi produise de la qualité, les vaches (vacos/vachos/bacos/bachos/vacas/vachas) seront bien gardées comme disait le Cévenol Florian.