Lettre ouverte sur les ESPE

Lettre ouverte à Madame la Ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, à Monsieur le Ministre de l'Éducation nationale, à Monsieur le Recteur de l'académie de Nantes et à Messieurs les Présidents des universités de Nantes, d'Angers et du Mans

Le remplacement des IUFM par les Écoles supérieures du professorat et de l'éducation (ESPE) aurait dû constituer un des principaux piliers de la refondation de l'école voulue par le Président de la République et le ministre de l'Éducation nationale. Mais vous avez, Monsieur le Ministre de l’Éducation nationale, confondu vitesse et précipitation. Et vous allez, en décidant de placer les concours de recrutement à la fin de la première année des masters d'enseignement, transformer ces diplômes en parodie de master. La première année se réduira nécessairement à une préparation scolaire des concours de recrutement, et la seconde année sera trop courte pour que les étudiants et fonctionnaires stagiaires et leurs formateurs aient vraiment le temps d'analyser les heures de pratiques accomplies pendant les stages et d'en tirer matière à la rédaction d'un mémoire universitaire digne de ce nom. Ces stages se dérouleront en effet sur des postes d'enseignement à mi-temps, dans des écoles ou établissements parfois éloignés des universités, et ils ne laisseront que peu de place à l'ESPE pour confronter, dans de bonnes conditions, les professeurs-stagiaires-étudiants aux savoirs pédagogiques, notamment dans le mémoire.

Sur l'académie de Nantes, les choix que vous – Monsieur le Recteur, Messieurs les présidents d'université – avez décidés risquent de conduire la formation des enseignants à un probable échec. Certes les délais imposés par le ministère pour élaborer le dossier d'accréditation de la future ESPE étaient extrêmement courts. Mais était-ce une raison pour se dispenser d'une véritable concertation avec les personnels de l'IUFM ? Le bilan de cet institut n'a même pas été tenté, et vous n'avez, semble-t-il, pas imaginé que des acquis très positifs, construits au cours de ses vingt-deux ans d'expérience dans la formation des enseignants, pouvaient contribuer à élaborer le nouveau projet. Le projet que vous avez présenté au CA des trois universités va aggraver ces défauts originels.

Aujourd'hui, alors que devraient s'ouvrir les serveurs d'inscription, personne ne sait où seront inscrits les étudiants en première année de master et les étudiants-professeurs stagiaires en seconde année, ni comment se répartira le financement de leur formation entre les universités concernées. Par ailleurs aucune solution claire n'est prévue pour les étudiants qui échoueront au concours : seront-ils inscrits en seconde année de master tout en préparant à nouveau les concours, devront-ils s'inscrire dans un master différent de celui des lauréats, devront-ils renoncer à bénéficier d'une nouvelle préparation ? Personne ne le sait non plus. En revanche, tout le monde sait que 80% des lauréats aux concours d'enseignement n'ont réussi qu'à leur seconde, voire à leur troisième tentative. Que feront ces étudiants dans les années à venir ?

Votre incapacité à dépasser des points de vue différents s'est donc ajoutée à l'improvisation de la politique nationale pour aboutir dans notre région à un projet squelettique.

Des parodies de masters dans une usine à gaz : tel est notre sentiment aujourd’hui.

Pour toutes ces raisons, les représentants des personnels de l'IUFM ont voté contre le projet présenté au conseil d'école le 13 mai 2013 et le CA de l'Université de Nantes s'est abstenu à l'unanimité sur ce texte ! Tout comme le CA de l'Université d'Angers, tandis que le CA de l'Université du Maine refusait de se prononcer sur le dossier en l'état !

Nous, personnels de l'IUFM des Pays de la Loire soussignés, vous demandons, Monsieur le Recteur, Messieurs les Présidents d'Université, de prendre le temps et d'instaurer les méthodes de concertation permettant de revoir ce projet pour lui donner de l'ambition et de la cohérence, dans l'intérêt de la formation des futurs enseignants, et donc de l'école « refondée ».

Nantes, le 22 mai 2013



Intersyndicale FSU-CFDT-UNSA de l'IUFM des Pays de la Loire    Contacter l'auteur de la pétition