Les équipes artistiques, techniques et encadrantes des théâtres en première ligne de la catastrophe qui s’annonce.

Mesdames et Messieurs de la classe politique belge,

 

Depuis le 13 mars 2020, date de début du confinement, on a jusqu’à présent peu entendu la voix des actrices et acteurs, des équipes techniques et encadrantes des théâtres. Nous nous sommes tus.

 

Les actrices et acteurs jouent. 

Les équipes techniques édifient et assurent le bon fonctionnement de la machine théâtrale.

Les équipes encadrantes accueillent, répondent au téléphone, etc.

Nous travaillons là où on nous engage pour pratiquer nos métiers.

Nous sommes des centaines.

 

La saison qui s’en vient s’annonce catastrophique pour bon nombre d’entre nous. 

Tous les théâtres de la fédération ne fonctionnent pas de la même manière, non seulement parce que les esthétiques divergent (c’est ce que l’on appelle la richesse de l’offre culturelle) mais aussi parce que leurs modes de fonctionnement et de production dépendent parfois du cahier des charges inhérent à chaque entreprise.

Ces cahiers des charges ne vous sont pas inconnus puisque c’est vous qui les avez rédigés et fait signer aux responsables de ces théâtres qui se démènent pour les respecter bon gré mal gré.

Tous les théâtres ne doivent pas faire le même nombre de représentations annuelles ou la même quantité de spectacles ou n’ont pas les mêmes obligations en termes de rentrées financières propres.

Il ne s’agit nullement ici et il ne s’agira jamais de créer un clivage absurde entre les théâtres “de pointe” ou les théâtres “populaires”, toutes ces maisons dans lesquelles nous sommes invité.e.s à travailler sans distinction et où nous exerçons nos métiers.

 

Mais il est particulièrement urgent que les politiques (fédéral et communautaire) entendent les spécificités de chacun de ces théâtres et comprennent que le besoin de fréquentation du public et donc de billetterie est plus important pour certains théâtres que pour d’autres. Il en va de leur viabilité et surtout de la viabilité des centaines de personnes engagées dans ces lieux.

Nous qui ne sommes qu’actrices et acteurs, techniciens(iennes), les “minuscules essentiel.les”, nous dépendons directement de votre gestion politique en temps de crise car si cette donnée n’est pas prise en compte, ce seront des centaines d’emplois sur la saison à venir qui seront perdus pour des interprètes jouant pour des maisons comme  (liste non exhaustive): le TTO, le théâtre Royal des Galeries, le théâtre Royal du Parc, le théâtre le Public, le théâtre de Liège, le théâtre Jardin-Passion, le Magic Land, le ferme de Martinrou...etc.... etc...

 

Au-delà de tous les clivages qui ne nous intéressent pas et ne nous concernent pas entre subventionnés ou non, lorsque nous acceptons un contrat nous ne demandons pas quel est le pourcentage de recette nécessaire pour pouvoir être rentable et cela ne modifie en rien le sérieux de notre travail. 

On se fie à la FWB et sa gouvernance car ce n’est pas notre métier. 

Mais si ces maisons théâtrales dont les recettes propres sont capitales et qui dépassent de loin la subvention ne sont pas aidées en urgence, nous serons victimes d’un bain de sang social sans précédent . 

 

La mise au chômage économique et/ou temporaire de tant de personnes coûtera plus cher à l’état (et donc aux citoyen.ne.s) que le sauvetage de l’emploi. 

La culture est un secteur ÉCONOMIQUE, donc qui coûte ET qui rapporte. 

Vous rendez vous compte que si nous demandons l’ouverture des salles à 80% de leurs capacités, c’est parce que notre saison, nos salaires, nos loyers, nos enfants en dépendent? 

Vous rendez vous compte que les théâtres disposent des mêmes moyens techniques d’accueil et d’aération que les avions ou les transports en commun qui eux sont autorisés à totalement remplir leurs jauges ? 

Où est la logique de traitement sanitaire entre transport en commun et lieux culturels ? 

Vous rendez vous compte du nombre d’entre nous qui ne sont pas dépendants du chômage et qui n’y auront tout simplement pas droit ?

 

Si les actuelles mesures de sécurité sanitaires sont maintenues, une aide de 4,5 millions d’euros suffirait pour sauver tous les emplois de notre secteur pendant un an soit 6x moins que l’aide accordée à RTL (entreprise privée…) et Ô combien moins que celle accordée au secteur aéronautique.

4,5 millions d’euros, cela vous semble être une grosse somme pour sauver des centaines d’emplois? 

Alors que pensez vous du fait que le coût social de la mise au chômage des équipes, de la perte des charges patronales et d’impôts en tous genres coûterait 7,5 millions d’euros aux citoyens?

Soutenir l’emploi, c’est économiser 3 millions d’euros et faire en sorte que nos revenus nets ne diminuent pas d’environ 40%.

En temps de crise sanitaire et économique, avez vraiment le luxe de dépenser 3 millions d’euros “pour rien”?

Les théâtres qui réclament en urgence une aide pour compenser la perte de billetterie ne le font pas pour se sucrer sur la crise, faut-il sincèrement rappeler cette évidence ? Ce sont des ASBL, pas des entreprises privées et ils ne font donc pas de bénéfices, ils le font pour nous soutenir car la totalité de ces aides iraient à l’emploi. 

Il n’en va pas de leur survie mais de la nôtre, artistes et travailleurs du secteur théâtral.

Vous avez sauvé les murs, c’était nécessaire et nous vous en remercions mais c’est insuffisant. 

 

En 1957, Gérard Philippe signait un éditorial intitulé “Les acteurs ne sont pas des chiens”  où il écrivait que « Le théâtre ne doit pas appartenir à ceux qui ont les moyens d’attendre ou la chance de trouver un second métier conciliable avec les impératifs de notre condition”. 

Le public nombreux qui vient jusqu’à nous tous les soirs aura t’il rendez-vous, une fois la crise passée, uniquement avec les rares qui auront pu patienter économiquement?

 

Nous en avons assez d’être les derniers pris en compte dans vos calculs.

Nous en avons assez de devoir vous rappeler que nous participons économiquement à la société dans laquelle nous vivons, que nous payons des charges et des impôts.

Nous en avons assez de subir les multiples contradictions nées des situations impossibles dues à l’absence de logique de votre gestion de crise.

Nous en avons assez d’être ballotés du fédéral au communautaire et inversement.

Nous en avons assez de rappeler qu’aucun d’entre nous ne souhaite être au chômage mais que, qui que nous soyons, nous nous battons quotidiennement pour travailler.

 

Mesdames et messieurs décideurs politiques, ne laissez pas mourir les équipes qui dépendent de la présence du public. 

Une société a autant besoin d’avions qui volent que de théâtres qui jouent.

Enfin, nous avons reçu lors de la rédaction de cette lettre de nombreux soutiens de directions théâtrales.

Volontairement, nous prenons la parole à leurs places aujourd'hui, nous ne les citerons pas dans les signataires, de peur que fatigués, ils ne soient plus aptes par votre faute à nous protéger.


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